Les matières premières subissent de puissants vents contraires après un premier semestre dominé par les turbulences de l’offre et les chocs inflationnistes déclenchés par l’attaque de la Russie en Ukraine. La guerre en Ukraine a littéralement bousculé les marchés financiers mondiaux et a fait émerger les questions de dépendance énergétique et agricole des pays européens. Le sujet majeur de 2022 en dehors de la guerre en Ukraine reste la hausse des taux de la Réserve fédérale pour faire face à l’inflation galopante. Cela a pesé négativement sur les cours de l’or qui connaissent une période difficile.
Dans un tel contexte, pourquoi et comment investir dans les matières premières en 2022 ? Retrouvez les différents types de matières première, notre focus sur 3 matières premières particulièrement scrutées en 2022 : le blé, l’or et le pétrole, ainsi que nos explication sur les différents manières d’acheter et de vendre des commodities.
Qu’est-ce qu’une matière première ou commodities ?
Une matière première, ou commodity en anglais, est une ressource naturelle, c’est-à-dire produite par la nature. Une fois extraite, elle est utilisée par l’homme à des fins de fabrication de produits finis ou manufacturés. Les matières premières sont dans un premier temps collectées par l’homme puis transformées avant d’être commercialisées.
On distingue 4 principales catégories de matières premières :
- Les matières premières énergétiques : les énergies fossiles telles que le pétrole, le charbon ou le gaz. Ce sont des matières premières plutôt rares car leur quantité est limitée.
- Les matières premières agricoles : blé, maïs, coton, sucre, café ou encore cacao par exemple.
- Les métaux industriels : les métaux qui ont principalement un usage destiné aux activités industriels tels que le fer, le cuivre ou le zinc, l’aluminium, le nickel, le cobalt, l’acier ou encore le plomb.
- Les métaux précieux : les métaux qui sont considérés comme rares du fait de leurs coûts de production importants et de leur extraction parfois difficile comme l’or, l’argent, le palladium ou encore le platine
Pourquoi investir dans les matières premières en 2022 ?
L’investissement des matières premières pour quel profil ?
Les matières premières s’adressent à tous les types de profils, que l’on soit débutant ou investisseur expérimenté. Toutefois, ce sont des actifs complexes et certains éléments doivent être assimilés afin d’avoir une stratégie de trading adaptée.
Comment varient les matières premières ?
Tout d’abord, il faut savoir que ces actifs sont affectés par plusieurs facteurs. Les conditions météorologiques ont un impact important sur certaines matières premières, comme la production agricole pour laquelle la variation de la météo et les catastrophes naturelles jouent un rôle considérable. La variation des saisons et de la température a des conséquences importantes sur la production de plusieurs matières premières et impacte ainsi le cours de ces produits.
La variation des taxes sur l’exportation des matières premières dans un pays peut aussi avoir une grande influence sur le cours de celles-ci.
Pendant les périodes de crise sanitaire ou de tension géopolitique, les matières premières peuvent être affectées à la fois au niveau de la production mais également au niveau du transport de ces dernières et donc de leur commercialisation. Ainsi, l’offre de ces matières premières est affectée car leur quantité disponible diminue à mesure que les crises s’intensifient.
Le marché des changes peut également jouer un rôle prépondérant dans l’évolution des cours de certaines matières premières agricoles. C’est le cas du réal brésilien pour les cours du café, ou encore du dollar puisque généralement, les matières premières sont exprimées dans cette devise. Alors, lorsque la valeur de ce dernier augmente, le prix des matières premières augmente aussi.
Quel avenir pour les investissements dans les matières premières agricoles ?
“L’invasion de l’Ukraine par la Russie créera une pénurie mondiale de blé pendant au moins trois saisons en empêchant une grande partie de la récolte ukrainienne d’atteindre les marchés, ce qui fera grimper les prix à des niveaux records “ a déclaré à Reuters le ministre ukrainien de l’agriculture.
Focus sur le blé qui se retrouve sous pression
L’Ukraine, surnommée le grenier à blé de l’Europe, connaît un certain nombre de difficultés dans l’exportation de ses céréales à la suite de l’invasion de la Russie. En effet, les voies maritimes d’exportation de céréales sont aujourd’hui bloquées par la Russie. Les champs de blé se retrouvent minés et le manque d’espace de stockage des céréales pèse sur les relations commerciales du pays. Avant la guerre, l’Ukraine exportait jusqu’à 6 millions de tonnes de céréales par mois, mais les conditions extrêmes que rencontre le pays ont réduit le volume à 300 000 tonnes en mars et à environ 1 million de tonnes en avril. Aucun accord sur l’exportation de blé hors d’Ukraine n’a pour lors été conclu. Actuellement, les prix du blé sont revenus aux niveaux les plus bas d’avril. Sur un autre plan, les températures aux États-Unis restent plus élevées, ce qui pourrait encore détériorer la qualité de la récolte de blé. Le dernier rapport de l’USDA a montré que la saison 2022/23 actuelle entraînera la production mondiale de blé au niveau le plus faible en 4 ans, tandis que les stocks seront au plus bas en 6 ans.
Se dirige-t-on vers une crise alimentaire mondiale ? L’Europe dispose d’environ 4 millions d’hectares disponibles en jachère pour la culture. Cependant, la question est de savoir si cela sera suffisant pour combler le déficit attendu sur le marché du blé. Une action coordonnée des pays producteurs de blé (en dehors de la Russie et de l’Ukraine) est aujourd’hui envisagée mais cela risque de ne pas soulager le marché du blé à court terme. De plus en plus de voix s’élèvent pour dire que les prix des céréales et de l’huile de cuisson ont atteint un sommet et que les coûts alimentaires mondiaux aussi. Les récoltes de blé d’hiver sont en cours dans l’hémisphère nord et celles de blé de printemps, de maïs et de soja suivront plus tard. L’attention se tourne désormais sur la production en Australie, au Brésil et en Argentine dans la résolution de cette crise alimentaire. En l’absence de problèmes météorologiques, la production pourrait augmenter car les agriculteurs plantent davantage en réponse à la hausse des prix.
Évolution de la qualité du blé US sur 5 ans
Source : USDA
La qualité du blé américain s’est améliorée avant la saison des récoltes, mais reste moins bonne qu’au cours des cinq dernières années.
Analyse technique du cours du blé
Source : xStation5
Les cours du blé ont baissé de plus de 28 % depuis le sommet du 18/05. La baisse semble s’être arrêtée au niveau du support à 902,53 où coïncide la SMA 200 (ligne rouge). Toutefois, on constate d’un point de vue technique que le RSI évolue en dessous de sa zone de neutralité de 50, ce qui signifie que les vendeurs ont toujours le contrôle du marché et que la baisse pourrait probablement reprendre. Dans un tel contexte, le support susmentionné serait à envisager.
Quel avenir pour les investissements dans l’or ?
L’or a connu une période difficile, la guerre en Ukraine a déclenché un bond des prix, mais qui a été de courte durée. Alors que le calendrier de hausse des taux de la Réserve fédérale se précise davantage avec récemment le discours de Jerome Powell le 22 juin qui a souligné que le risque de récession était élevé et qu’il sera très difficile de réaliser un « atterrissage en douceur », comment va réagir l’or à la possible prochaine hausse de 75 points de base en juillet ?
Focus macro sur l’or
La hausse des taux d’intérêt ainsi que le renforcement du dollar ont été les principales raisons de la récente chute des cours de l’or. La hausse des taux d’intérêt renforce l’intérêt des investisseurs envers le marché monétaire plutôt que vers l’or, valeur refuge par excellence. Toutefois, cela n’est pas le seul obstacle que rencontrent les cours de l’or actuellement.
Le marché de la joaillerie a subi de plein fouet une baisse de 30 % au cours du premier trimestre, principalement en raison de la baisse de près de 50 % de la demande en Chine et d’une baisse de la demande en Inde. La demande de bijouterie est un pilier essentiel du marché de l’or et représente environ 50 % de la demande totale d’or.
Concernant la demande d’investissement dans l’or, celle-ci s’est maintenue au premier trimestre principalement grâce aux ETF qui ont renforcé leurs positions avec l’éclatement à l’Est de la guerre, alors que la demande physique, elle, a diminué. Les ETF ont tendance à vendre beaucoup d’or en période de hausse des taux d’intérêt. Par conséquent, la forte demande de bijoux et d’or physique constitue un soutien essentiel pour les prix de l’or dans ces périodes.
Par ailleurs, un constat alarmant sur l’effondrement de l’extraction de l’or a été révélé. Cela est principalement dû aux vagues de restrictions liées à la pandémie en Chine. La situation en Chine a également un impact sur la demande d’or pour la bijouterie et les investissements. Le “retour à la normale” que l’on voit progressivement se profiler en Chine devrait donc soutenir l’or d’un point de vue fondamental.
Enfin, récemment, les prix de l’or se sont stabilisés après que le G7 a annoncé une probable interdiction de nouvelles importations en provenance de Russie. Mais selon certains analystes, cela n’aura probablement pas d’impact à plus long terme. En effet, le marché a déjà intégré que l’industrie a déjà pris des mesures pour restreindre l’or russe. Toutefois, l’or russe pourrait trouver acheteurs auprès de la Chine et de l’Inde, pays demandeurs et ne faisant pas partie du G7. Néanmoins, la stabilité de l’or en cette période d’incertitude actuelle suggère que l’or continue de jouer son rôle d’actif refuge
Répartition de la demande d’or mondial entre les investissements et les banques centrales
Source : Bloomberg, WGC, XTB Research
La demande d’investissement et la demande des banques centrales continuent de rebondir.
Analyse technique du cours de l’or
Source : xStation5
Les cours de l’or continuent d’évoluer au sein d’un range intégré le 16/05 avec pour borne inférieure 1 804,85 et pour borne supérieure 1 868,51. Si une hausse des taux devait être annoncée par la Fed en juillet, une baisse en direction de la borne inférieure du range pourrait être envisagée. Les perspectives baissières sont renforcées par le fait que le RSI évolue en dessous de sa zone de neutralité de 50.
Quel avenir pour les investissements dans le pétrole ?
Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie qui a propulsé les prix du pétrole vers des records historiques, les prix de l’or noir évoluent de façon mitigée. La situation en Ukraine et les décisions à venir de l’OPEP+ sur la production de pétrole seront déterminantes pour les perspectives futures du pétrole.
Focus macro sur le pétrole
Deux raisons peuvent expliquer le récent repli des prix du pétrole : d’une part, les inquiétudes concernant le ralentissement économique demeurent ; et d’autre part, la possibilité que des taxes supplémentaires soient prélevées sur le secteur pétrolier américain a semé la panique.
Le but de ces nouvelles taxes est d’encourager les producteurs de pétrole à augmenter la production et le raffinage, c’est-à-dire que si un producteur ne veut pas payer une taxe exceptionnelle, il devra augmenter la production. Cependant, l’imposition d’une telle taxe est plutôt improbable avant les élections de mi-mandat à l’automne.
Par ailleurs, la Libye a annoncé qu’une grande partie de sa production a été rétablie. Les niveaux de production ont atteint 800 000 barils par jour, contre 100 000 ces dernières semaines. Cependant, la situation dans le pays est volatile, un autre arrêt de la production ne peut donc pas être exclu. L’ambassadeur américain en Libye a déclaré que le pays réduisait sa production afin d’exercer une pression à la hausse sur les prix. Les exportations seraient suspendues à partir de 4 terminaux d’exportation pour une capacité totale de 630 000 barils par jour.
L’Arabie saoudite, quant à elle, augmente la production, les exportations et les stocks de pétrole, ce qui pourrait être négatif pour les prix à court terme. Toutefois, la capacité de production de l’Arabie Saoudite et des Émirats arabes unis est aujourd’hui remise en cause. En effet, ces pays seraient actuellement proches de leur capacité maximale de production. En ce sens, Joe Biden devrait se rendre en Arabie Saoudite en juillet afin d’entamer des discussions avec Mohammed ben Salmane, prince héritier, afin d’obtenir une augmentation de la production de pétrole de la part du royaume.
Les stocks de pétrole de Cushing ont chuté à des niveaux extrêmement bas d’environ 20 millions de barils, ce qui suggère que la demande à court terme reste forte. Récemment, les prix du pétrole ont réussi à se redresser et le WTI est passé au-dessus de 109 dollars le baril, tandis que le Brent a atteint 111,50 dollars.
Les dirigeants du G7 ont promis de soutenir l’Ukraine « aussi longtemps qu’il le faudra », et ont discuté d’un mécanisme de plafonnement des prix du pétrole russe tout en cherchant d’autres moyens de réduire la capacité du Kremlin à financer sa guerre en Ukraine, ce qui a soutenu les prix de l’or noir.
Par ailleurs, l’OPEP+ a réduit son estimation de l’excédent de pétrole en 2022 à 1 mbpj, contre 1,4 mbpj précédemment.
La faiblesse des stocks de pétrole au hub de Cushing
Source : Bloomberg
Les stocks au hub de Cushing sont à des niveaux extrêmement bas au début de la période estivale généralement chargée.
La clientèle méditerranéenne du pétrole russe
Source : Bloomberg
La Russie ne vend pas seulement plus de 50 % de pétrole en plus à la Chine qu’avant la guerre, la Russie est également toujours très active en Méditerranée.
Analyse technique du cours du pétrole
Source : xStation5
Les prix de l’or noir sont récemment parvenus à franchir à la hausse le nuage Ichimoku, signalant une potentielle reprise de la demande. Si le sentiment actuel prévaut, les prix du pétrole pourraient franchir la résistance à 115,59 où coïncide le retracement de Fibonacci à 100 % de la baisse de juillet 2014. En cas de succès, la résistance à 118,71 constitue la prochaine cible pour les acheteurs. On remarque d’un point de vue technique que le RSI s’apprête à franchir la zone de neutralité de 50, renforçant ainsi les perspectives haussières sur les prix du pétrole.
Comment investir dans les matières premières
Aujourd’hui les marchés financiers offrent plusieurs solutions aux investisseurs souhaitant investir dans les matières premières. Les investisseurs, selon leur profil de risque et la rentabilité recherchée, vont pouvoir investir dans les matières premières à travers des instruments financiers offrant des avantages et des risques différents.
Investir dans les matières premières en direct
Il est tout à fait possible d’acheter en direct la matière première, c’est-à-dire la posséder physiquement. C’est le cas pour les métaux précieux comme l’or, sous forme de lingots ou bien de pièces. De plus, l’or peut être un bon investissement en temps de guerre et d’instabilité car il est considéré comme une valeur refuge.
Investir dans les matières premières avec des ETF
Les ETF sont des fonds négociés en bourse sur lesquels on peut investir assez facilement. Ils suivent généralement des indices de référence qui eux sont constitués d’un groupe d’actifs (les matières premières par exemple). Ainsi, vous pouvez tout à fait investir sur les matières premières de manière indirecte en investissant dans des ETF dont l’indice de référence est constitué de matières premières. Toutefois, de cette manière on ne possède pas directement le ou les actifs puisque ce sont des sociétés qui gèrent ces ETF.
Investir dans les matières premières avec des OPCVM traditionnels
Les OPCVM ou Organisme de placement collectif en valeurs mobilières permettent, en délégant la gestion à un gérant, d’investir dans des sociétés et en l’occurrence des sociétés du secteur des matières premières. Cela permet ainsi de s’exposer à l’évolution des cours des matières premières.
Investir dans les matières premières avec des produits dérivés
Il existe une multitude de produits dérivés disponibles sur les marchés financiers. Nous avons choisi de vous présenter les deux principaux utilisés pour investir dans les matières premières.
Tout d’abord les options, ces produits dérivés donnent le droit d’acheter ou de vendre une quantité d’actifs sous-jacents (actions, devises, etc.) pendant une période et à un prix convenu à l’avance. Elles permettent d’acheter le règlement à la fin du contrat contrairement aux contrats à terme.
Les contrats pour la différence (CFD) permettent de suivre l’évolution à la hausse comme à la baisse d’un actif. Les contrats pour la différence sont aussi des instruments financiers à effet de levier. Cela permet aux investisseurs de multiplier leur profit mais aussi leur perte en cas de mauvaise anticipation.
Investir dans les matières premières via les actions en Bourse de sociétés du secteur
Un autre moyen pour les investisseurs d’investir dans les matières premières de manière indirecte est d’investir dans des actions. Par exemple, si l’on décide d’investir indirectement dans le pétrole, on pourra alors acheter des actions du groupe TotalEnergies, Exxon ou encore BP. En effet, ces sociétés dont l’activité est basée sur l’exploitation pétrolière dépendent directement des facteurs qui ont des conséquences sur les cours du pétrole comme les décisions de l’Opep+, l’impact de la baisse ou de la hausse de la demande ou encore les conditions météorologiques qui peuvent se répercuter sur la production. Ainsi, cela permet à la fois d’investir dans les matières premières mais de profiter des avantages que confèrent les actions comme les dividendes.
Nos conseils pour trader et investir dans les matières premières
Les matières premières sont une classe d’actifs relativement complexes car, comme évoqué plus haut, elles sont soumises à un certain nombre de facteurs qui influencent directement la production et la demande de ces actifs. Elles sont caractérisées par une volatilité importante du fait du nombre de facteurs que l’on ne peut contrôler ni même prédire. C’est pourquoi, il est plus sage lorsque que l’on commence le trading sur les matières premières, de se concentrer sur une ou deux matières premières afin d’assimiler correctement les enjeux et l’environnement de ces actifs. Le choix de l’instrument financier par lequel on souhaite investir doit également être préalablement étudié, afin d’avoir une stratégie de trading adaptée au profil de risque de l’investisseur.
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